
Artemisia annua, plante originaire d’Asie, est aujourd’hui cultivée à Madagascar où elle joue un rôle croissant dans la lutte contre le paludisme et dans l’économie agricole locale. Voici un panorama détaillé de sa culture sur la Grande Île, de l’itinéraire technique aux enjeux agronomiques et économiques.
1. Conditions pédoclimatiques et choix des sites
- Artemisia annua s’adapte à de nombreux types de sols, mais préfère les terrains bien exposés, légers et riches en nutriments. À Madagascar, la région d’Antananarivo a montré un fort potentiel pour cette culture, grâce à son climat tempéré et ses sols adaptés5.
- La plante supporte les sols argileux, mais la richesse du sol en matières organiques et en éléments minéraux (notamment azote, phosphore et potassium) optimise sa croissance et la teneur en artémisinine 5.
- Le photopériodisme est un facteur clé : des journées d’environ 12 heures peuvent induire une floraison précoce, réduisant le rendement en artémisinine 5.
2. Calendrier et techniques culturales
- Le cycle optimal de culture à Madagascar s’étend de novembre-décembre à juillet-août. Des semis jusqu’en février sont possibles, mais plus le semis est tardif, plus le cycle est court et le rendement réduit 5.
- La préparation du sol comprend un labour, suivi d’un hersage ou fraisage. Un faux semis (préparation du terrain, levée des adventices, puis deuxième hersage) est conseillé pour limiter les mauvaises herbes 5.
- La fertilisation recommandée est de 80 unités d’azote, 70 de phosphore et 90 de potassium par hectare, généralement sous forme de fumure organique ou minérale 5,3.
3. Multiplication et installation de la culture
- Les graines d’Artemisia annua sont extrêmement fines (12 000 graines/gramme), rendant le semis direct délicat. La méthode privilégiée est la production de plantules en pépinière protégée, puis transplantation au champ 5,3.
- Les semis se font en plate-bandes à l’abri de la pluie et du soleil direct. Les graines sont mélangées à du sable ou de la cendre pour faciliter la répartition, puis légèrement recouvertes de terreau ou de sable 5.
- Les plantules sont repiquées en motte après 3-4 semaines, quand elles mesurent 3-4 cm, puis transplantées au champ à 10-12 cm de hauteur, environ 7 semaines après le semis 5,3.
- La densité de plantation varie selon la vigueur des plants : de 10 000 à 30 000 plants/ha, selon qu’il s’agisse de semences hybrides ou non 3.
4. Gestion de l’eau et de la floraison
- L’irrigation est essentielle, surtout durant les premiers mois (janvier-mars), car le stress hydrique peut induire une floraison précoce et réduire la teneur en artémisinine 5,3.
- Un minimum de 600 à 650 mm de pluie est requis pour une culture pluviale, mais un système d’irrigation est souvent nécessaire pour sécuriser la production 3,5.
5. Entretien, maladies et ravageurs
- À Madagascar, aucun ravageur ou maladie majeure n’a été signalé sur cette culture, ce qui facilite la gestion sanitaire des parcelles5.
- Le désherbage manuel reste indispensable, surtout en début de cycle, pour limiter la concurrence des adventices5.
6. Récolte, effeuillage et séchage
- La récolte intervient environ 5 mois après la plantation, idéalement juste avant la floraison, car la teneur en artémisinine chute rapidement après l’apparition des boutons floraux 5.
- La récolte est mécanique ou manuelle (faucheuse), suivie d’un effeuillage : seules les feuilles sont conservées, car elles concentrent la molécule active 5.
- Le séchage doit être rapide et à l’ombre pour préserver la qualité des feuilles et leur teneur en artémisinine 5.
7. Multiplication végétative et amélioration variétale
- La multiplication par bouturage est pratiquée pour conserver les lignées à forte teneur en artémisinine, mais elle reste plus coûteuse et exigeante en main-d’œuvre que le semis 5,6.
- Madagascar a développé des variétés particulièrement riches en artémisinine, comme la variété « Artemis », protégée à l’UPOV, dont les feuilles séchées peuvent dépasser 1,3 % d’artémisinine 5.
8. Enjeux économiques et sociaux
- La culture d’Artemisia annua représente une alternative intéressante pour les agriculteurs malgaches, offrant des débouchés locaux et internationaux, notamment pour l’industrie pharmaceutique 7.
- Elle s’inscrit dans des programmes de lutte contre le paludisme, avec la production de feuilles séchées destinées à la phytothérapie ou à l’extraction industrielle de l’artémisinine 7,5.
Conclusion
La culture d’Artemisia annua à Madagascar repose sur des techniques adaptées à la spécificité de la plante et du climat local. Elle offre des perspectives économiques et sanitaires majeures, à condition de respecter des itinéraires techniques rigoureux et de poursuivre les efforts de sélection variétale. Madagascar s’affirme ainsi comme un acteur clé dans la production mondiale de cette plante stratégique pour la santé publique 5,3,7.
Citations:
- https://pmc.ncbi.nlm.nih.gov/articles/PMC7404215/
- https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0254629922006743
- https://www.mmv.org/sites/default/files/uploads/docs/artemisinin/2010_Madagascar/Cultivation_of_Artemisia_in_Africa_and_Asia.pdf
- https://maison-artemisia.org/en/artemisia-agronomy/artemisia-annua/
- http://www.secaar.org/documents/documentation/SA6_ARTE.pdf
- https://pmc.ncbi.nlm.nih.gov/articles/PMC8279915/
- https://www.tmrjournals.com/article.html?J_num=8&a_id=3650
- https://www.slideshare.net/slideshow/fac-2006-giblain/20413720